Ça fait un an et demi, à peu près, nous avons de nouveaux éducateur qui débarquent dans les institutions que je côtoie. Ils passent une formation en trois ans pour avoir le diplôme d’éducateurs spécialisés, c’est à dire, le plus haut diplôme d’Éduc. à mon avis. Ils ont de 18 à 22 ans, aucune expérience. La première année, ils viennent faire un stage de 3 ou 4 mois dans les institutions, et ce sont des stages d’observation : c’est comme ça qu’on les appelle.
C’est bien, mais c’est des gens qui manquent beaucoup d’expérience, qui n’ont pas d’expérience de la vie au travail, du rapport à l’autre, et faire des stages d’observation, ça me fait rigoler. Parce que en fait, ça n’aide pas l’institution, ça n’aide pas les équipes, ça n’aide pas les résidents ou les usagers de centre de jour, puisque les gens sont là en stage d’observation.
Donc ils ne font pas rien, mais quasiment. Moi, ça me pose question, car ces métiers là, d’éducateurs ou d’AMP, tous, tu sais bien que tu vas t’occuper de personnes plus ou moins dépendantes et de différentes pathologies.
Je comprends qu’il faut une semaine ou deux d’observation, mais il faut impérativement que le centre de formation prenne conscience :
- qu’ils nous envoient des jeunes sans expérience et qu’ils mettent en place dès la première année,
- que les gens qui viennent en stage doivent rentrer en relation avec les différentes personnes accueillies.
Ça va aider les équipes, ça va nous aider, nous les personnes handicapées, personnes vieillissantes, enfin tout type de handicap, et ça va leur montrer s’ils sont prêts ou pas à faire ce métier.
Parce que ce métier, c’est s’occuper de l’autre, et si tu ne vas pas vers l’autre, et si tu n’apprends pas le B-A BA : enlever les vestes, donner à manger, enfin accompagner dehors, faire des sorties, et prendre conscience que tu es là pour aider les autres. Que c’est ça ton taf.
On a besoin de jeunes, sûr, on a fait un appel pour des gens qui voudraient s’investir dans le social, c’est une certitude. Mais il ne faut pas leur apprendre qu’à travailler de l’écrit, des PPA, des projets d’établissement, pas que des papiers.
Il y a à apprendre le B-A BA : à être bien avec l’autre, être en relation, leur demander à quoi ils s’intéressent. Regarder comment les équipes travaillent, mais au bout de 15 jours travailler, réellement travailler, faire manger les gens, regarder s’il y a des gens qui sont plus en relation avec d’autres, accompagner aux toilettes, faire une toilette. Et oui, ça va vous apprendre à mûrir et ça va vous apprendre le métier. Et ça on l’oublie.
On veut former de bons petits soldats qui sachent bien manipuler les grilles d’évaluation, qui les remplissent bien, qui fassent des projets en écrits, et qui obéissent bien aux ordres de la direction. Pour faire de bons petits soldats pour bien appliquer toutes les lois qui sont en vigueur pour le médico-social.
Mais pas leur apprendre ce que c’est que le social.
Le social, pour moi, c’est rentrer en relation avec l’autre. De plus en plus les nouveaux éducateurs qui arrivent, qui sont trop jeunes, ils ne sont pas assez mûrs, il leur faut au moins une année pour comprendre où ils mettent les pieds.
Envoyez-nous des gens mûrs et prêts à travailler, s’il vous plaît, je demande ça à toutes les écoles d’éducateurs, d’AMP. Et que leurs formateurs disent : « vous êtes en stage d’observation, certes, mais au bout d’un moment, il faut y aller ; il faut montrer que vous avez envie d’aller vers l’autre, de vous intéresser, de faire des trucs, et pas observer simplement ».
Les gens qui nous observent tout le temps, ça ne nous apporte rien. Ça n’apporte rien aux autres. Moi, je le dis parce que je suis capable de parler, j’ai cette chance, alors je le dis. Si les gens ne sont pas assez mûrs, il ne faut plus faire de stage d’observation. Un stage d’observation, au bout de 15 jours, il faut y aller, aider les équipes, les résidents, pour vous rendre compte si vous êtes fait pour ça ou pas pour ça.
Et il y a des gens différents intellectuellement ; et bien intéressez vous à tout le monde : à celui que a des difficultés intellectuelles, et aussi à celui qui n’a pas de difficulté intellectuelle et qui aime bien parler, échanger, et qui a besoin d’aide aussi.
À bon entendeur….. Voilà ma réflexion du jour sur les stagiaires en observation de la future génération. Y a du boulot !
Jérome Corderet 31 janvier 2024